Et si vos chantiers racontaient une histoire ?

  1. Introduction Économie circulaire : pourquoi changer de modèle ?

L’économie circulaire s’impose aujourd’hui comme une réponse incontournable à l’épuisement du modèle linéaire traditionnel fondé sur la logique extraire fabriquer utiliser jeter. Si une première évolution a été amorcée avec le recyclage, cette étape, bien que vertueuse, montre rapidement ses limites : elle reste énergivore, dépendante d’industries spécialisées parfois éloignées des territoires et insuffisante pour répondre aux enjeux globaux.

Le réemploi, la réparation et la réutilisation constituent désormais les leviers structurants du modèle à venir. Ils permettent d’allonger la durée de vie des matériaux, de préserver la valeur de la matière initiale et de créer de nouvelles chaînes de valeur locales. L’image d’une poubelle vide, utilisée comme fil conducteur, illustre clairement ce changement de paradigme : le déchet devient ressource.

L’économie circulaire ouvre ainsi des champs d’opportunités multiples :

  • création de valeur par l’usage prolongé des matériaux,
  • développement de nouveaux métiers : dépose soignée, reconditionnement,
  • logistique inversée,
  • émergence de nouveaux opérateurs publics et privés,
    renforcement de l’économie locale.

 

  1. Les enjeux spécifiques de la filière BTP

Les données de l’ADEME rappellent l’ampleur de l’enjeu : avec 213 millions de tonnes de déchets produits en 2020, le BTP représente à lui seul 70 des déchets en France. Si 52 millions de tonnes font déjà l’objet de réemploi ou de réutilisation, la part du bâtiment reste marginale comparée aux travaux publics.

Ces chiffres montrent néanmoins que la circularisation du secteur est possible et déjà engagée. Le territoire du Pays Cœur d’Hérault dispose d’acteurs économiques mobilisés, condition indispensable pour enclencher une dynamique locale structurée et génératrice de retombées économiques.

 

  1. Structurer une filière territoriale : l’exemple du PTCE Préméo

La présentation du PTCE Préméo par Sophie Costeau a permis d’illustrer concrètement comment un territoire peut structurer une filière de réemploi grâce à une logique de coopération économique.

Préméo agit comme un tiers de confiance, capable d’articuler ambitions publiques et réalités économiques, autour de plusieurs axes :

  • identification et captation des gisements BTP,
  • structuration de chaînes de valeur locales,
  • développement de compétences spécifiques,
  • sécurisation des pratiques : technique, assurantielle,
  • animation de plateformes et d’outils mutualisés.

Cette approche démontre que le réemploi peut devenir un véritable projet de développement territorial, et non une simple expérimentation marginale.

 

  1. Réemploi et réglementation : un cadre désormais favorable

Contrairement aux idées reçues, la réglementation française constitue aujourd’hui un accélérateur du réemploi. Julie Verrecchia Envirobat Occitanie a rappelé les fondements réglementaires clés :

  • la loi AGEC et la hiérarchie des modes de traitement,
  • le diagnostic PEMD, outil stratégique d’identification des gisements,
  • la REP PMCB, qui impose des objectifs chiffrés de réemploi,
  • la RE2020, qui valorise fortement le réemploi dans l’analyse de cycle de vie.

Les outils mis à disposition cartographies, kits marchés publics, retours d’expérience permettent aux acteurs de ne pas repartir de zéro, sécurisant ainsi le passage à l’action.

 

  1. Retours d’expérience : du concept à la réalité opérationnelle

5.1. La Cité éducative de la Mosson

La diffusion de la vidéo du chantier Préméo au quartier de la Mosson a démontré la faisabilité technique et économique du réemploi à grande échelle, avec une organisation rigoureuse de la dépose, du stockage et du remontage.

5.2. Le chantier École Bénézet Toulouse

Présenté par Laura Luczynski Synéthic, ce projet constitue désormais un cas d’école du réemploi massif dans un projet public :

  • objectifs contractuels clairs,
  • typologie des réemplois pour maîtriser les risques,
  • résultats chiffrés très élevés,
  • impacts économiques et sociaux positifs.

Ce retour d’expérience confirme que le réemploi fonctionne lorsqu’il est anticipé, gouverné et outillé.

 

  1. Échanges avec les intervenants : freins et leviers identifiés

Les échanges ont mis en évidence plusieurs enseignements clés :

  • le réemploi impacte peu le temps de chantier mais nécessite plus d’ingénierie en amont,
  • le diagnostic PEMD doit nourrir la conception,
  • la logistique et le stockage constituent le principal frein pour les artisans,
  • la sécurisation passe par des protocoles clairs et documentés,
    le réemploi redonne du sens aux métiers.

Le rôle du territoire apparaît central pour mettre en réseau, coordonner et sécuriser.

 

  1. Ateliers et débats : vers une intelligence collective territoriale

Les débats mouvants ont révélé la complexité des arbitrages écologiques, économiques et culturels liés au réemploi. Ils ont aussi montré que le changement de pratiques est réel, mais qu’il peut s’appuyer sur une culture locale de coopération, notamment en milieu rural.

L’atelier, entre parties prenantes, a confirmé que :

  • les TPE sont au cœur du système mais nécessitent un fort accompagnement,
  • les acheteurs publics jouent un rôle pivot,
  • les structures de l’ESS sont des relais naturels,
    la logistique et la simplification sont des conditions de réussite.

 

  1. La Boucle : un accélérateur régional structurant

La présentation de La Boucle a mis en lumière un outil déjà opérationnel, gratuit et pensé comme une infrastructure régionale du réemploi. Son rôle de guichet unique, de mise en relation et de professionnalisation constitue un levier majeur pour les territoires ruraux souhaitant massifier sans s’isoler.

 

  1. Conclusion générale Une feuille de route à co construire
    Cette journée marque le lancement d’une dynamique collective structurante.

La montée en compétence des élus, acheteurs publics, services techniques, entreprises et artisans apparaît comme un levier transversal incontournable, tout comme le rôle central de l’acheteur public dans la structuration des filières locales.

Enfin, le contexte électoral à venir constitue une fenêtre d’opportunité stratégique pour anticiper les chantiers, identifier les futurs gisements et organiser des boucles locales de matière à l’échelle du bassin de vie.

Dans cette perspective, La Boucle, accélérateur régional du réemploi, s’impose comme un outil structurant, opérationnel et immédiatement mobilisable, capable de fédérer les acteurs, sécuriser les pratiques et massifier les flux.

Cette journée ouvre ainsi la voie à une feuille de route collective, pragmatique et territorialisée, faisant du réemploi un levier concret de transition écologique, économique et sociale pour le Pays Cœur d’Hérault.